vendredi 19 mars 2010

Tourisme culturel au 19ème s. !



(c) Oger et Camper

Avec une gouache représentant l'éruption du Vésuve (lot, 111, est. 3/3500 euros), la maison Oger et Camper nous plonge, lors d'une vente qui aura lieu à Drouot le 26 mars, au coeur des habitudes touristiques du XIXème s. L'Italie est alors une destination de choix pour l'aristocratie et la grande bourgeoisie. Avec les redécouvertes de Pompéi en 1763 et Herculanum en 1738, le Vésuve a exercé sur les touristes du XIXème s une grande fascination.

Qu'est ce que le Grand Tour ?

A l'origine du terme "touriste", il existe une pratique qui naît, en Europe du Nord, au XVIIème s et trouve son apogée aux XVIIIème et XIXème s, il s'agit du Grand Tour, appelé également Tour du Chevalier. Il s'agit, à l'origine, pour les jeunes aristocrates de se former aux pratiques militaires, diplomatiques et intellectuelles dans des pays étrangers tels que la France, l'Allemagne, la Suisse et principalement l'Italie. Viendront par la suite la Grèce et l'Asie Mineure. Au XVIIIème s et surtout au XIXème s, le Grand Tour sera surtout le fait d'amateurs d'art, de collectionneurs ou d'artistes comme Goethe, Turner, Lord Byron, venus redécouvrir le passé artistique de l'Italie afin de mieux nourrir leur art.

Le Grand Tour est l'apanage d'une élite, il permet de faire étalage de ses moyens financiers, de sa culture et de réseau social étendu au-delà même des frontières de sa patrie. Il permettait également de se forger une culture commune : on pouvait alors échanger entre gens bien nés des histoires et des anecdotes sur des lieux touristiques que tous avaient visités.  

En Italie, les étapes nécessaires sont alors Florence, pour y admirer les oeuvres de la Renaissance, Rome, pour son passé antique, et Naples, proche de laquelle ont été redécouverts les sites de Pompéi et Herculanum et qui fascinent les touristes de l'époque.

Tableaux, objets d'art, antiques, copies d'antiques sont alors exportés de manière prodigieuse; On se fait également portraituré par les artistes en vogue comme Pompeo Batoni. Le tableau ci-dessous de Johann Zoffani nous montre l'attrait énorme qu'exerçaient l'Antiquité et l'Italie sur les amateurs d'art du XIXème s, qui commanditaient alors des artistes pour acheter, en Italie ou en Grèce, de véritables antiques ou en faire des copies. Cette oeuvre représente Charles Towneley, dans sa résidence de Park Street, à Londres, au milieu de sa collection. Il ramena d’Italie beaucoup d’antiques et les déposa dans sa demeure de Park Street, avant que ceux-ci soient rachetés par le British Museum en 1783. On peut notamment voir, au premier plan, le Discobole, rajouté a posteriori car découvert en 1790.


La mode du Grand Tour, à part une petite résurgence durant la Restauration (1830-48), prendra fin avec la Révolution Française et le Premier Empire, du fait des troubles qui secouent alors le continent et incitent les aristocrates anglais à rester dans leur patrie.

Pour en revenir à notre gouache, il s'agit plutôt de ce que l'on pourrait qualifier de "peinture-souvenir". En effet, avec l'émergence du tourisme en Italie, des peintres se spécialisent dans des vues d'Italie, à l'instar de Canaletto, pour ne citer que le plus connu, qu'ils vendent à une clientèle de passage. L'utilisation de l'aquarelle ou de la gouache répond donc à la nécessité d'exécuter des oeuvres plus rapidement et en plus grand nombre, mais permettent d'introduire plus de naturalisme.

De grands peintres comme Achille Etna Michallon prennent l'éruption Vésuve comme sujet, témoignage de la force de la nature et sujet de prédilection pour la peinture du Sublime.



Les gouaches, dont celle vendue par la maison Oger et Camper, est un très bel exemple de cette production de souvenirs, le plus souvent anonymes, et toujours composés de la même manière. La gouache est encadrée de noir, elle porte en mention manuscrite du jour et l'année de l'éruption représentée, le plus souvent celles de 1794, 1810 et 1822. On en trouve de deux tailles différentes : environ 40 cm par 30 et destinées à être encadrées, ou bien des plus petites, 10-15 cm par 5-10, destinées à être mises dans des albums. Elles sont d'une facture assez naïve et figurent des vues de jour ou de nuit de l'éruption, mais aussi des vues de Naples et de ses environs.

Ces pièces, pour les plus beaux grand formats, se vendent, aujourd'hui,  entre 1500 et 3500 euros, et pour les petits formats, quelques centaines d'euros, généralement entre 300/400 euros.

A vos enchères !

Informations pratiques :

Exposition : Le jeudi 25 mars 2010 de 11h à 18h et le vendredi 26 mars de 11h à 12h

Vente du Vendredi 26 mars 2010à  14h

Lieu : Drouot Richelieu - Salle 15 - 9, rue Drouot - 75009 Paris

Catalogue en ligne :
http://www.ogercamper.auction.fr/FR/v14169-oger-camper-numismatique-archeologie-art-extreme-orient-tableaux-orfevrerie-mobilier/index.html

Pour aller plus loin :
Anthony Burgess et Francis Haskell, Le Grand Siècle du Voyage (1967), Paris, Albin Michel, 1968

Gouaches napoletane del Settecento e dellOttocento: Museo Pignatelli, 20 dicembre 1985-28 febbraio 1986

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